André Guillemoto,

né le 20 février 1920, à Merlevenez, décédé en 2013

Témoignage recueilli en 2012.

 

J’ai été correspondant de presse une trentaine d’années, jusqu’à l’âge de 70 ans, en 1990. Les journaux étaient déposés au bureau de tabac : Ouest-Éclair, puis Ouest-France, le Télégramme que j’avais lancé par ici et la Liberté du Morbihan, anciennement le Nouvelliste. J’ai commencé vers 1965 en tant que correspondant sportif, au Télégramme d’abord, ensuite pour Ouest-France. Je faisais les deux à un moment donné et j’ai dû choisir.

J’étais aussi sur les chantiers comme travailleur du bâtiment. Déjà flappy de mon boulot, je trouvais encore le temps de me déplacer pour des photos, le soir, le dimanche ou les jours fériés. Par photo parue, nous avions dix francs, ce qui était super à l’époque. J’étais jeune et j’avais une passion, mais ce n’était pas toujours rigolo. Mon téléphone n’arrêtait pas de sonner, alors la patronne bougonnait : « Encore ! ». Lorsque je rentrais à deux heures du matin, elle était heureuse ! A m’attendre, elle ne pouvait pas dormir. On me surnommait Tonton Flash, comme ma nièce m’avait baptisé. A force d’entendre ça avec les copains, j’en avais ma claque ! Pour ce métier-là, il ne faut pas manquer d’imagination. Parfois, on raconte plus que ce qu’on ne voie, de manière à faire mousser un petit peu, mais il vaut mieux rester objectif. Je me disais vite que j’étais en train de raconter des histoires. Il arrivait souvent dans la fougue d’écrire des âneries. Quand on voyait la production, le lendemain ou deux jours après, on se demandait ce qu’on avait été mettre là.

Mon truc le plus chouette était de confondre le Blavet avec le Scorff. Combien de fois cela m’est-il arrivé ! J’assistais aux conseils municipaux et aux réunions, mais ce n’était pas mon truc. Quand je faisais ma copie et que je n’avais pas tous les détails, j’allais voir le secrétaire de mairie le lendemain, pour avoir quelque chose de plus complet. J’ai souvent mis Louis Uhel en rogne, quand ce qui passait à la une de la presse ne lui plaisait pas. Je mettais carrément ce que je voyais.

 

Je couvrais les trois-quarts du canton. Rien qu’avec Plouhinec, Kervignac et Riantec, les trois communes les plus importantes, j’avais un paquet. Jean-François Caillot me remplaçait pendant les vacances. J’avais fini par lui céder Merlevenez, Sainte-Hélène et Nostang. J’avais gardé les autres, sauf Port-Louis et Locmiquélic, dont Yannick Michaud s’occupait. Lorsqu’il était en vacances, je prenais son boulot. A ce moment-là, j’y passais presque tout mon temps. J’allais aussi hors du canton, mais nous avions chacun nos terres. Il ne fallait pas que j’aille du côté de Pluvigner ! Maurice Deimat, une très bonne plume, aurait bondi ! J’ai toujours aimé écrire mes articles à la main, une manie, au contraire de mon copain, correspondant principal de Lomener pour la rubrique sportive. Il préférait utiliser une machine sur laquelle il tapait avec un doigt. Je transmettais mes copies à la rédaction de Lorient, où je me rendais tous les lundis. Ouest-France et le Télégramme se tenaient face à face sur la place du cinéma Le Royal, juste en face du Parisien. Les textes étaient corrigés, mais rarement modifiés. De différentes longueurs, ils prenaient parfois toute une page. Je mettais surtout mes initiales et je signais mes magazines sportifs.

 

Comme des tilts par moments, certains articles me reviennent, dans mon sommeil. Je retrouve des anecdotes et des choses spéciales qui m’ont frappé, des retours en arrière ou des flashes qu’au réveil j’ai complètement oubliés. J’ai conservé les archives dans ma chambre, que j’appelle mon atelier. Un bazar là-dedans ! Des pots de peinture, mes pinceaux, mes croquis, et surtout, naturellement, des boîtes de conserve vides qui me servent à mettre de l’eau ou préparer mes peintures. Autodidacte, je crayonnais déjà gosse, à sept ou huit ans. Certaines de mes toiles sont à la chapelle de la Madeleine. J’ai trop de matériel et la peinture à l’huile tâche. Je me suis mis à l’aquarelle. Peintre-décorateur, artisan puis salarié, à la tête d’une équipe, j’ai formé une quinzaine d’apprentis, tous les patrons-peintres des environs, à part la famille de Riantec pour qui j’ai travaillé. Nous préférions les plafonds plutôt qu’à genoux au sol, reboucher les parquets où le raboteur passait avant nous pour lisser le tout, à la main. J’affectionnais travailler à la brosse de 14 les portes en faux bois, pour lesquelles on m’appelait d’un peu partout. Enfin, j’ai monté des enseignes et des échafaudages jusqu’à Quiberon, ainsi que des quantités de décors de théâtre dans tous les coins par ici.

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